Geneviève Cadieux-Langlois

Le Vaisselier public aborde le récit peu connu de la Canadian Aluminum Works Company Limited, une manufacture d’accessoires de cuisine en aluminium, établie entre 1901 et 1906 sur la rue Bennett à Chambly. L’œuvre, en aluminium découpé et peint, présente une vaisselle aux formes surdimensionnées, aux traits fantaisistes et aux couleurs saturées, à l’image des rêves de prospérité projetés sur ces objets et de la charge émotionnelle dont ont investis les citoyens de l’époque.

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En dégageant certains faits historiques appuyés par la Société d’histoire de la seigneurie de Chambly, je m’interroge sur les valeurs, le rôle et les responsabilités des grandes entreprises envers les communautés d’une municipalité. Cette œuvre d’art public ouvre un espace de réflexion citoyenne autour des enjeux économiques des objets utilitaires qui façonnent notre quotidien.

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Dès les débuts de l’industrialisation au 19e siècle, les municipalités du Québec tentent de séduire les manufactures en octroyant des avantages en échange de promesses d’emploi et de prospérité économique. Don de terrains, exemption de taxes, pose gratuite de services publics et aménagement de voiries, sont quelques-uns de ces avantages encore parfois offerts aujourd’hui.

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La Canadian Aluminum Works ne fait pas exception au début du 20e siècle en bénéficiant d’un prêt de 20 000 $ en établissant son usine et sa fonderie. Cependant, l’entreprise déclare rapidement faillite, laissant derrière elle ses bâtisses et un inventaire considérable d’ustensiles invendus. On ne peut malheureusement alors que constater les répercussions économiques laissées au passage : précarité de familles ouvrières et perte de confiance envers les institutions. Afin de récupérer une partie des fonds perdus, le secrétaire-trésorier de la Ville organisera alors tous les samedis, au coin des rues Bennett et de l’Église, un marché où poêles à frire, casseroles, théières et cafetières trouvaient preneurs à bon prix.

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De mon point de vue, cette initiative à échelle humaine apparaît tel un geste de réhabilitation des pouvoirs économiques en faveur des communautés. De cette mince compensation pour les emplois et les perspectives évaporés, il s’en dégage une certaine candeur, symbole d’un dernier legs à la population de ce rêve déchu. Dans un esprit ludique et accessible, je convie la population à réfléchir aux impacts des grandes entreprises au sein de leur collectivité. La prospérité économique est-elle suffisante pour aspirer à une vie meilleure ? Peut-on imaginer des valeurs véhiculées par des industries qui priorisent les ouvriers et travaillent à leur bien-être ? Quelles sont leurs responsabilités envers leur communauté et comment les municipalités peuvent-elles assurer un équilibre des pouvoirs économiques ?

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La création de cette œuvre a été rendue possible en 2023 grâce à l’initiative et l’appui financier de la Ville de Chambly. Le projet bénéficie également de l’Entente de partenariat territorial entre le Conseil des arts et des lettres du Québec, le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation et les villes de l’agglomération de Longueuil. Je remercie la Société d’histoire de la seigneurie de Chambly ainsi que l’équipe du Service loisirs et culture de la Ville de Chambly. Je tiens aussi à souligner la complicité et l’expertise de Ghislain Brodeur, François-Xavier Gaudreault et Guillaume Boudrias-Plouffe.

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Références: Les faits historiques ont été extraits du Cahier de la seigneurie de Chambly no 10, rédigé par Armand Auclair en 1983 à la page 29 ainsi que de l’article On a fabriqué des ustensiles d’aluminium à Chambly de l’auteur Paul-Henri Hudon publié dans le quotidien web Le Montérégien le 13 septembre 2021.